mercredi 21 janvier 2009

Marchés des produits physiques et Marchés des produits papiers

De nos jours il existe deux mondes, celui des marchés des produits physiques du pétrole, des matières premières et des produits agroalimentaires et celui des marchés des produits papiers équivalent à ces mêmes catégories de produits, mais constitués d'écritures comptables, financières, informatiques et non de produits physiques.

De même, il existe des acteurs commerciaux (producteurs et consommateurs) et des acteurs non-commerciaux (investisseurs financiers) intervenant sur ces marchés.

Les marchés des produits physiques ont un cycle réel de production et de consommation qui passent par la capacité à constituer des stocks de produits, à les entreposer et à pouvoir réaliser les livraisons des produits dans certains délais, les transporter, entre producteurs ou distributeurs et consommateurs finaux.
Un producteur ne peut vendre et livrer que la quantité de produit qu'il a la capacité de produire, stocker et livrer physiquement. De même, un consommateur ne peut acheter et se faire livrer que la quantité de produit qu'il peut consommer immédiatement, stocker(réservoir d'essence de voiture, cuve, entrepôts) et se faire livrer physiquement et qu'il peut payer.

Les quantités maxima achetées et vendues, à un certain moment, sur les marchés réels sont réalisés à la fois en fonction de la production et de la demande de produits, mais aussi en fonction des capacités de stockage au niveau des acheteurs et vendeurs, des capacités de livraisons et des délais de livraisons et des capacités de paiement.

La fixation des prix réels doit tenir compte de tous les éléments du marché réel; c'est ce qui doit aussi servir de référence pour l'ensemble des acteurs économiques.
Mais aujourd'hui, il semble que les acteurs économiques commerciaux ne peuvent pas se référer à un véritable marché physique transparent. Ils ne peuvent se référer qu'à un seul marché de papier déconnecté des réalités du cycle réel.

Les marchés des produits papiers représentant le pétrole-papier, les matières premières-papiers et les produits agroalimentaires-papiers sont constitués d'écritures comptables, financières, informatiques qui ne reprennent et ne représentent pas la totalité du cycle réel d'échange, c'est en cela qu'ils sont déconnectés du marché réel physique.

Sur les marchés papiers, les phases de stockage et de livraison et leurs contraintes n'existent pas et même le paiement total du prix peut être évité, grâce aux achats et ventes à découvert, ce qui permet de générer de la spéculation.

Sur les marchés de produits papiers, les quantités achetées ou vendues ne sont liés qu'à la capacité financière de l'intervenant et les achats et ventes à découvert permettent de solder une position avant toute phase de paiement. Bien évidemment la capacité de stockage et de livraison ne sont pas pris en compte, puisqu'il n'y a que la fonction achat et vente qui est retenu pour le fonctionnement de ces marchés, permettant ainsi une spéculation financière.

Il est donc anormal du fait de ce dis-fonctionnement, que les prix des marchés papiers se répercutent sur les prix des marchés physiques du pétrole, des matières premières et des produits agroalimentaires. Que sont devenues les bourses de commerces ? Elles sont détenues majoritairement par des financiers, des acteurs non-commerciaux, plutôt que par les acteurs commerciaux que sont les producteurs et consommateurs directs.

Dans Les Echos, dans un article concernant les investisseurs non-commerciaux sur les matières premières , on relève que "selon les chiffres cités par Michael Masters, leurs allocations d'argent réservées à cette catégorie est passée de 13 milliards de dollars en 2003 à... 260 milliards en mars 2008.
Et, selon ce gérant de « hedge fund », leur demande s'est accrue sur le marché pétrolier, d'environ 848 millions de barils par an au cours des cinq dernières années, soit l'équivalent de la croissance de la demande chinoise.
Ils détiendraient de même assez de blé pour fabriquer les quantités de pain, de pâtes et de pâtisseries que vont avaler les Américains au cours des deux prochaines années. Leur impact serait d'autant plus grand sur le marché qu'ils investissent sur le très long terme en reconduisant leur exposition au travers d'instruments de produits dérivés..".

Si tous les investisseurs non-commerciaux devaient stocker, transporter, livrer et payer les sommes investies sur les marchés des matières premières sans en avoir la capacité réelle, une grande majorité s'abstiendraient.

Les mêmes principes de fonctionnement doivent réguler les marchés des produits physiques et des marchés des produits papiers.
Il faut créer des bourses ou marchés de commerces réservés aux acteurs commerciaux sur lesquels :

  • Pour réduire et si possible éliminer la spéculation financière et son impact sur les marchés des produits physiques, il faut interdire les achats et les ventes à découvert pour tous ces produits primaires de base.
  • Il faut rendre la livraison des produits obligatoire avant d'avoir l'autorisation de pouvoir revendre.
Ainsi la formation des prix tiendrait compte de l'offre et de la demande, mais aussi du cycle réel des produits physiques et non plus d'une pure spéculation financière, basée sur une simulation limitée à la seule offre et demande de produits-papiers soumis à aucune contrainte.

Une régulation autonome et différenciée des marchés financiers existants, propre aux produits des matières premières, agricoles, énergies, doit être mis en place qui devrait distinguer tout ce qui concerne les acteurs commerciaux des acteurs non-commerciaux.



Auteur : Françoise Moreau
Rédigé Le : 10 juin 2008



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